Les pages de droit public principalement ainsi que toutes autres branches de droit - Webmestre : Bertrand GRONDIN
Ce wiki possède 556 articles.

Conseil d'État, 367290

De Gdn
Aller à : navigation, rechercher

Conseil d'État, 367290
Conseil d’État
12 décembre 2014


2ème sous-section jugeant seule – Mme A… c/ Préfet du Gard – 367290


Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public



Décision

Visas

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 mars et 1er juillet 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d’État, présentés pour Mme B… A…, demeurant au … et pour la fédération de l’administration générale de l’État Force Ouvrière ; Mme A…et la fédération de l’administration générale de l’État Force Ouvrière demandent au Conseil d’État :

1°) d’annuler le jugement n° 1201879 du 7 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande tendant, d’une part, à l’annulation de la décision implicite du 23 mars 2012 par laquelle le préfet du Gard a refusé à Mme A… la prise en compte d’un malaise comme accident de service, d’autre part, à l’annulation de l’arrêté préfectoral n° 2012/071 bis du 29 mai 2012 par lequel le préfet du Gard a refusé de reconnaître l’imputabilité au service de ce malaise et à l’annulation de la décision implicite du ministre de l’intérieur rejetant son recours hiérarchique, enfin à ce qu’il soit enjoint au préfet du Gard de reconnaître à Mme A…l’imputabilité au service du malaise et de sa chute accidentelle en date du 13 décembre 2011, ainsi que de la maladie déclarée le même jour ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à la demande présentée au tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de l’État le versement de la somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens de l’instance y compris la contribution à l’aide juridique prévue à l’article R. 761-1 du même code ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

Vu le décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 ;

Vu le décret n° 2007-1488 du 17 octobre 2007 ;

Vu le code de justice administrative ;

Motifs

1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A…, directrice de la réglementation et des libertés publiques à la préfecture du Gard, a participé en qualité de représentante du personnel à Paris le 13 décembre 2011 à une réunion de la commission administrative paritaire nationale compétente à l’égard des directeurs de préfecture et des attachés d’administration de l’intérieur au ministère de l’intérieur ; qu’elle a été victime d’un malaise sur la voie publique alors qu’elle regagnait la gare à l’issue de cette réunion ; que, par un arrêté en date du 29 mai 2012 le préfet du Gard, qui a suivi l’avis de la commission de réforme départementale, a décidé que ce malaise n’était pas imputable au service ; que Mme A…se pourvoit en cassation contre le jugement du 7 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté ;

2. Considérant qu’aux termes de l’article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État : " Le fonctionnaire en activité a droit : (…) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l’intéressé dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions (…). / Toutefois, si la maladie provient de l’une des causes exceptionnelles prévues à l’article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d’un accident survenu dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l’intégralité de son traitement jusqu’à ce qu’il soit en état de prendre son service ou jusqu’à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l’accident " ;

3. Considérant qu’un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d’une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l’absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service le caractère d’un accident de service ; qu’il en va de même pour tout accident survenu alors que le fonctionnaire est en mission, sauf s’il a eu lieu lors d’une interruption de cette mission pour des motifs personnels ; qu’il appartient au juge administratif, saisi d’une décision de l’autorité administrative compétente refusant de reconnaître l’imputabilité au service d’un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l’espèce ;

4. Considérant qu’il ressort pièces du dossier soumis aux juges du fond, notamment des certificats et rapports médicaux établis à la demande de Mme A…et du préfet, que le malaise dont a été victime Mme A… est intervenu alors qu’elle était en déplacement pour participer à la réunion du 13 décembre 2011 au ministère, au cours de laquelle elle a été informée de ce que sa candidature pour des fonctions auxquelles elle postulait n’était pas retenue et que, si ce malaise a pu être favorisé par une pathologie préexistante, celle-ci s’inscrivait dans un état d’épuisement professionnel ; qu’en jugeant, dans les circonstances de l’espèce, que ce malaise n’était pas imputable au service alors que le dossier qui lui était soumis ne faisait apparaître aucune circonstance particulière détachant cet événement du service, le tribunal administratif a inexactement qualifié les faits de la cause ; que, dès lors, le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 7 février 2013 doit être annulé ;

5. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond en application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le préfet du Gard, par arrêté du 29 mai 2012, a refusé de reconnaître l’imputabilité au service du malaise dont a été victime Mme A… le 13 décembre 2011 ; que toutefois, ainsi qu’il a été dit précédemment, ce malaise est survenu alors que Mme A… était en déplacement à Paris pour participer, en sa qualité de représentante du personnel, à une réunion de la commission administrative paritaire nationale dont elle était membre ; qu’au vu des circonstances particulières de l’espèce, notamment celles dans lesquelles a été annoncé à Mme A… le rejet de sa candidature, et de l’état de tension dans lequel se trouvait l’intéressée au cours de ce déplacement professionnel au moment où est survenu le malaise, et alors qu’il ne ressort des pièces du dossier aucune circonstance particulière de nature à détacher cet événement du service, le malaise survenu le 13 décembre 2011 doit être regardé comme étant imputable au service ; que, par suite, Mme A… est fondée, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de sa demande, à demander l’annulation de l’arrêté du préfet du Gard du 28 mai 2012, ainsi que celle de la décision implicite par laquelle le ministre de l’intérieur a rejeté son recours hiérarchique ;

7. Considérant que si l’exécution de la présente décision conduit à ce qu’il soit enjoint au préfet de reconnaître l’imputabilité au service du malaise survenu le 13 décembre 2011, en revanche, la présente décision n’implique pas, par elle-même, que la maladie déclarée par Mme A…après le 13 décembre 2011 soit reconnue comme étant imputable au service ;

8. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’État le versement à Mme A…de la somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 7 février 2013 est annulé.

Article 2 : L’arrêté du préfet du Gard du 29 mai 2012 et la décision implicite du ministre de l’intérieur du 16 juillet 2012 sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Gard de reconnaître l’imputabilité au service du malaise subi par Mme A… le 13 décembre 2011.

Article 4 : L’État versera à Mme A… une somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme A… est rejeté.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme B…A…, à la fédération de l’administration générale de l’État Force Ouvrière et au ministre de l’intérieur.

Résumé

FONCTION PUBLIQUE

Accident de service. – Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d’une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l’absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service le caractère d’un accident de service. Il en va de même pour tout accident survenu alors que le fonctionnaire est en mission, sauf s’il a eu lieu lors d’une interruption de cette mission pour des motifs personnels. Il appartient au juge administratif, saisi d’une décision de l’autorité administrative compétente refusant de reconnaître l’imputabilité au service d’un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l’espèce.


Commentaire