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Conseil d’État - 280163

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Conseil d’État - 280163
Conseil d’État
25 juillet 2008


10ème/9ème SSR - Commissariat à l'Énergie atomique - 280163


M. Julien Boucher, commissaire du gouvernement



Visas

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 mai et 2 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d’État, présentés pour le Commissariat à l'Énergie atomique, dont le siège est 33, rue de la Fédération à Paris (75015) ; le Commissariat à l'Énergie atomique (CEA) demande au Conseil d’État :

  1. d’annuler le jugement du 25 février 2005 par lequel le tribunal administratif de Paris, à la demande de M. Vincent A, a, d’une part, annulé la décision du CEA refusant de communiquer les comptes annuels du Centre d’études sur l’évaluation de la protection dans le domaine nucléaire (CEPN) comportant le bilan, le compte de résultats, les rapports des commissaires aux comptes, les décisions du CEPN fixant le montant de l’adhésion du CEA pour les années 2000 à 2003 et les procès-verbaux des assemblées générales pour les années 2000 à 2002 et, d’autre part, enjoint au CEA de communiquer à M. A ces documents dans le délai d’un mois ;
  2. réglant l’affaire au fond, de rejeter la demande de M. A ;

Vu les autres pièces du dossier ; la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ; la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ; le code de justice administrative ;

Motifs

Considérant qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 17 juillet 1978, dans sa rédaction alors en vigueur : « Le droit de toute personne à l’information est précisé et garanti par le présent titre en ce qui concerne la liberté d’accès aux documents administratifs. / Sont considérés comme documents administratifs, au sens du présent titre, tous dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives, avis, prévisions et décisions, qui émanent de l’État, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes de droit public ou privé chargés de la gestion d’un service public. Ces documents peuvent revêtir la forme d’écrits, d’enregistrements sonores ou visuels, de documents existant sur support informatique ou pouvant être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant. » ; que l’article 2 de la même loi dispose : « Sous réserve des dispositions de l’article 6, les autorités mentionnées à l’article 1er sont tenues de communiquer les documents administratifs qu’elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent titre (…) » ; qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 12 avril 2000 : « Sont considérés comme autorités administratives au sens de la présente loi les administrations de l’État, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d’un service public administratif » ; qu’aux termes de l’article 10 de la même loi : « Les budgets et les comptes des autorités mentionnées à l’article 1er et dotées de la personnalité morale sont communicables à toute personne qui en fait la demande dans les conditions prévues par la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978. / La communication de ces documents peut être obtenue tant auprès de l’autorité administrative que de celles qui les détiennent (…) » ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un courrier du 12 novembre 2003, M. A a demandé au Commissariat à l'Énergie atomique la communication, sur le fondement des dispositions de la loi du 17 juillet 1978, d’une part, des décisions de l’association « Centre d’études sur l’évaluation de la protection dans le domaine nucléaire » (CEPN) qui fixent le montant de l’adhésion du Commissariat à l'Énergie atomique pour les comptes 2000 à 2003, et, d’autre part, des comptes annuels 2000 à 2002 de cette association (bilans, comptes de résultats), des rapports des commissaires aux comptes (général et spéciaux) et des procès-verbaux des assemblées générales 2000 à 2002 ; qu’à la suite du refus de lui communiquer les documents demandés, M. A a saisi la Commission d’accès aux documents administratifs qui, par un avis du 23 février 2004, a émis un avis défavorable à la communication des décisions fixant le montant de l’adhésion et un avis favorable à la communication des autres documents ; que le Commissariat à l'Énergie atomique demande l’annulation du jugement du 25 février 2005, par lequel le tribunal administratif a annulé sa décision refusant de communiquer l’ensemble des documents et lui a enjoint de communiquer à M. A les documents sollicités ;

Considérant, en premier lieu, qu’indépendamment des cas dans lesquels le législateur a lui-même entendu reconnaître ou, à l’inverse, exclure l’existence d’un service public, une personne privée qui assure une mission d’intérêt général sous le contrôle de l’administration et qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l’exécution d’un service public ; que, même en l’absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l’intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu’aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l’administration a entendu lui confier une telle mission ;

Considérant que le Centre d’études sur l’évaluation de la protection dans le domaine nucléaire est une association qui a pour objet « l’étude, dans le domaine nucléaire, de l’évaluation, de la protection de l’homme sous ses aspects techniques, biologiques, économiques et sociaux » ; qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que cette association a été créée par Electricité de France, alors établissement public, et par le Commissariat à l'Énergie atomique, pour le compte desquels elle est chargée des évaluations précitées et dont elle perçoit des subventions ; que par suite, en jugeant que le Centre d’études sur l’évaluation de la protection dans le domaine nucléaire était un organisme privé chargé d’une mission de service public au sens de la loi du 17 juillet 1978, le tribunal administratif, qui a mentionné tant l’objet que les conditions de création et de fonctionnement de l’association, n’a pas commis d’erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’il résulte des dispositions précitées des articles 1er et 10 de la loi du 12 avril 2000 que les comptes annuels du Centre d’études sur l’évaluation de la protection dans le domaine nucléaire pour 2000 à 2002, les rapports des commissaires aux comptes et les procès-verbaux des assemblées générales de cet organisme, qui retracent les conditions dans lesquelles l’association exerce la mission de service public qui lui a été confiée, présentent par leur nature et leur objet le caractère de documents administratifs communicables ; qu’il en est de même, dans les circonstances de l’espèce, des décisions du Centre d’études sur l’évaluation de la protection dans le domaine nucléaire qui fixent le montant de l’adhésion du Commissariat à l'Énergie atomique pour les années 2000 à 2003, dès lors que ces documents se rattachent à la mission de service public de l’association ; que, par suite, le tribunal administratif n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que les documents en cause constituent des documents administratifs communicables ;

Considérant, en troisième lieu, qu’il résulte des dispositions précitées des articles 1er et 2 de la loi du 17 juillet 1978 que les établissements publics doivent communiquer les documents administratifs qu’ils détiennent même s’ils n’en sont pas les auteurs ; qu’il n’est pas sérieusement contesté que le Commissariat à l'Énergie atomique, établissement public, détient les documents en cause ; que, dès lors, le Commissariat à l'Énergie atomique était tenu de communiquer les documents demandés à M. A ; que, par suite, le tribunal administratif, qui n’a pas entaché son jugement d’insuffisance de motivation ni de dénaturation des faits, n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que le requérant était tenu de communiquer le document demandé ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le Commissariat à l'Énergie atomique n’est pas fondé à demander l’annulation du jugement attaqué… (Rejet de la requête)