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Conseil d'État - 13975

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Conseil d'État - 13975
Conseil d'État
19 juin 1981


Anonyme
3ème/5ème SSR - Secrétaire d'État aux Postes et Télécommunications c/ M. LEBAUT - 13975


M. Daniel Labetoulle, commissaire du gouvernement


Décision

Visas

  • Vu le recours sommaire, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'État le 11 août 1978, et le mémoire complémentaire enregistré le 9 novembre 1978, présentés par le Secrétaire d'État aux postes et télécommunications et tendant à ce que le Conseil d'État:
    1. annule l'article 1er du jugement du 24 mars 1978 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé des décisions des 23 mars 1976 et 12 janvier 1977 en tant qu'elles portaient suspension du droit à l'avancement de M. Lebaut pour la journée du 5 février 1976;
    2. rejette les conclusions de M. Lebaut tendant à l'annulation de ces décisions ;
  • Vu l'ordonnance du 4 février 1959 et le décret du 14 février 1959; Vu le code des tribunaux administratifs, l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953, la loi du 30 décembre 1977

Motifs

CONSIDÉRANT, en premier lieu que par une décision n° 10 en date du 12 mars 1976, qui n'a pas été notifiée à l'intéressé, le directeur départemental des Postes des Hauts-de-Seine a suspendu les droits à traitement, à avancement et à pension de M. Lebaut pour la journée du 5 février 1976; que cette suspension a été confirmée par une nouvelle décision du directeur départementale en date du 23 mars 1976, dont la copie a été adressée à M. Lebaut, et qui n'a pas été rapportée par l'effet des décisions n° 12 et 13, en date du 12 janvier 1977, par lesquelles le directeur départemental a d'une part rapporté la décision n° 10 du 12 mars 1976, d'autre part remplacé celle-ci par des dispositions identiques;

Considérant en deuxième lieu que par une lettre en date du 28 juin 1976. M. Lebaut a été avisé que ses droits à traitement, à avancement et à pension avaient été suspendus pour la journée du 9 mars 1976 par une décision en date du 12 mars 1976; Considérant en troisième lieu que par une décision du 8 septembre 1976, la prime de rendement attribuée à M. Lebaut a été diminuée pour tenir compte des absences irrégulières des 5 février et 9 mars 1976;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 23 mars 1976, en tant que cette décision porte suspension des droits à avancement

Considérant qu'en indiquant dans le préambule de la constitution du 27 octobre 1946, auquel se réfère le préambule de la constitution du 4 octobre 1958, que le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent, l'Assemblée constituante a entendu inviter le législateur à opérer la conciliation entre la défense des intérêts professionnels, dont la grève constitue l'une des modalités, et la sauvegarde de l'intérêt général, auquel elle peut être de nature à porter atteinte ;

Considérant qu'en l'absence de la réglementation ainsi annoncée par la constitution et que la loi du 31 juillet 1963 relative à certaines modalités de la grève dans les services publics ne saurait constituer à elle seule, il appartenait au gouvernement responsable du bon fonctionnement des services publics de fixer lui même, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et l'étendue des limitations qui doivent être apportées au droit de grève en vue d'en éviter un usage abusif ou contraire aux nécessités de l'ordre public ;

Considérant que, dans le cadre des prérogatives qui appartiennent en la matière au gouvernement, le secrétaire l'État aux postes et télécommunications a pu légalement limiter par avance l'exercice du droit de grève des personnels de l'administration des postes en désignant les agents qui, en raison de l'importance des fonctions qu'ils exercent, devraient assurer la continuité et la sécurité du service postal ; qu'en sa qualité d'adjoint immédiat du chef d'établissement, M. Lebaut, inspecteur des postes, a pu être rangé parmi les fonctionnaires tenus de demeurer à leur poste en toutes circonstances ; qu'ainsi, et en tout état de cause le directeur départemental des postes a pu légalement décider que l'intéressé s'était placé en état d'absence irrégulière en participant au mouvement de grève du 5 février 1976 ;

Considérant que l'administration ne pouvait pour autant décider, à fin de régularisation, que l'intéressé serait regardé comme étant en position de disponibilité pendant cette journée ; qu'il conservait donc pleinement ses droits à avancement dans les conditions prévues à l'ordonnance du 4 février 1959 et au statut particulier qui lui était applicable; que le secrétaire d'État aux postes et télécommunications n'invoque aucune disposition du statut dont relève M. Lebaut qui subordonnerait l'avancement à l'accomplissement de services effectifs ; que la suspension des droits à avancement de M. Lebaut pour la journée du 5 février 1976 est en conséquence illégale ; que, par suite, le secrétaire d'État n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 23 mars 1976 en tant qu'elle suspend le droit à avancement de M. Lebaut pour la journée du 5 février 1976 ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation du 23 mars 1976, en tant que cette décision porte suspension des droits à pension

Considérant que c'est seulement à l'occasion de la liquidation de sa pension de retraite que M. Lebaut sera recevable à faire valoir ses droits et contester, le cas échéant, le décompte des services effectifs qu'il a accomplis ; qu'ainsi la décision du 23 mars 1976, en tant qu'elle suspend ses droits à pension pour la journée du 5 février 1976, ne lui fait pas grief; que, dès lors, les conclusions dirigées contre cette mesure étant irrecevables, M. Lebaut n'est pas fondé à se plaindre, par la voie du recours incident, que le tribunal administratif de Paris les a rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision n° 13 du 12 janvier 1977

Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que M. Lebaut a reçu notification de cette décision le 14 janvier 1977 ; qu'il n'en a demandé l'annulation devant le tribunal administratif de Paris que le 22 mars 1977, soit après l'expiration du délai du recours contentieux ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler le jugement du tribunal administratif en tant qu'il a admis la recevabilité des conclusions dirigées contre la décision n° 13 du 12 janvier 1977 et de rejeter ces dernières comme irrecevables;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 12 mars 1976 suspendant les droits à traitement, à avancement et à pension pour la journée de 9 mars 1976

Considérant que pour contester la tardiveté opposée par le tribunal administratif à ces conclusions, présentées le 22 mars 1977 alors que la décision attaquée a été notifiée à l'intéressé le 28 juin 1976, M. Lebaut se borne à invoquer les circonstances de l'espèce et à affirmer que les décisions relatives aux journées des 5 février et 9 mars 1976 forment un ensemble indissociable ; qu'il n'apporte aucun élément de nature à démontrer que ses conclusions dirigées contre la décision du 12 mars 1976 ont été présentées dans les délais du recours contentieux ; que par suite, il n'est pas fondé à soutenir par la voie du recours incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif les a rejetées comme irrecevables;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 8 septembre 1976 portant diminution de la prime de rendement de M. Lebaut

Considérant que cette prime de rendement est versée en considération de la valeur des agents et de l'activité qu'ils ont déployée au cours de l'année ; que, par suite, l'administration pouvait légalement tenir compte des absences de M. Lebaut les 5 février et 9 mars 1976, motivées par sa participation irrégulière à deux mouvements de grève, pour diminuer le montant de la prime qui lui a été attribuée que M. Lebaut n'est donc pas fondé à soutenir, par la voie du recours incident, que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions contre la décision du 8 septembre 1976...(Annulation du jugement du tribunal administratif de Paris en date du 24 mars 1978 en tant qu'il a admis la recevabilité des conclusions dirigées contre la décision du directeur départemental des postes des Hauts-de-Seine en date du 12 janvier 1977 ; rejet des conclusions présentées par M. Lebaut devant le tribunal administratif de Paris et tendant à l'annulation de la décision du directeur départemental des postes des Hauts-de-Seine en date du 12 janvier 1977 ; rejet du surplus du recours du secrétaire d'État aux postes et télécommunications et à la télédiffusion et du recours incident de M. Lebaut.)

Résumé

FONCTIONNAIRES PUBLICS 

Absence irrégulière liée à une grève. - Décision de neutraliser la carrière d'un agent au point de vue de l'avancement et de la retraite. - Texte prévoyant une telle neutralisation - Absence - Illégalité de la décision.

PROCÉDURE 

Décision informant un fonctionnaire de la suspension de ses droits à retraite. - Acte faisant grief. - Absence. - Contestation possible à la liquidation de la retraite de l'agent.

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