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Conseil d’État - 294195

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Conseil d’État - 294195
Conseil d’État
13 juillet 2007


1ère/6ème SSR - Société « Éditions Tissot » - 294195


M. Luc Derepas, commissaire du gouvernement



Visas

Vu la requête, enregistrée le 9 juin 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’État, présentée par la Société « Éditions Tissot », dont le siège est 9, rue du Pré Paillard, Parc des Glaisins, B.P. 109 à Annecy-le-Vieux cedex (74941) ; la Société « Éditions Tissot » demande au Conseil d’État :

1°) d’annuler la délibération n° 2006-56 du 3 avril 2006 par laquelle la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, saisie par Mlle Yasmine A pour harcèlement moral à connotation raciste, d’une part, lui a recommandé, la mise en place d’une formation des personnels d’encadrement et des ressources humaines sur le harcèlement moral et le droit du travail applicable et la création d’une procédure d’alerte favorisant l’expression de tous les salariés dans des conditions satisfaisantes et le règlement amiable des conflits et, d’autre part, a informé Mlle A, qu’il lui appartient, en application de l’article 13 de la loi du 30 décembre 2004, de solliciter de la juridiction prud’homale qu’elle invite la haute autorité à présenter ses observations dans son dossier ;

2°) de mettre à la charge de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité le versement d’une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ; Vu la loi n° 2004-1486 du 30 décembre 2004 ; Vu le décret n° 2005-215 du 4 mars 2005 ; Vu le code de justice administrative ;

Motifs

Considérant qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 30 décembre 2004 portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité : « Il est institué une autorité administrative indépendante dénommée haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité./ La haute autorité est compétente pour connaître de toutes les discriminations, directes ou indirectes, prohibées par la loi ou par un engagement international auquel la France est partie » ; qu’aux termes du premier alinéa de l’article 4 de la même loi : « Toute personne qui s’estime victime de discrimination peut saisir la haute autorité, dans des conditions précisées par décret en Conseil d’État » ; qu’aux termes du premier alinéa de l’article 5 de cette loi : « La haute autorité recueille toute information sur les faits portés à sa connaissance » ; que l’article 11 de cette loi dispose : « La haute autorité peut formuler des recommandations tendant à remédier à tout fait ou à toute pratique qu’elle estime être discriminatoire, ou à en prévenir le renouvellement./ Les autorités ou personnes intéressées sont tenues, dans un délai fixé par la haute autorité, de rendre compte à celle-ci de la suite donnée à ces recommandations. La haute autorité peut rendre ses recommandations publiques dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État./ En l’absence de compte rendu des personnes intéressées ou si elle estime, au vu du compte rendu qui lui est communiqué, que sa recommandation n’a pas été suivie d’effet, la haute autorité peut établir un rapport spécial qui est publié au Journal officiel de la République française » ; qu’enfin, son article 13 prévoit que « Les juridictions civiles, pénales ou administratives peuvent, lorsqu’elles sont saisies de faits relatifs à des discriminations, d’office ou à la demande des parties, inviter la haute autorité ou son représentant à présenter des observations(…) » ;

Considérant, d’une part, qu’il résulte de ces dispositions que lorsqu’elle émet des recommandations sans faire usage de la possibilité dont elle dispose de leur assurer une publicité particulière, la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité n’énonce pas, en principe, des règles qui s’imposeraient aux personnes privées ou aux autorités publiques, mais recommande aux personnes concernées les mesures qui lui semblent de nature à remédier à tout fait ou à toute pratique qu’elle estime être discriminatoire, ou à en prévenir le renouvellement ; que, par suite, ces recommandations ne constituent pas, par elles-mêmes, des décisions administratives susceptibles de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir ; qu’il en irait, en revanche, différemment de recommandations de portée générale, qui seraient rédigées de façon impérative ;

Considérant, d’autre part, que le simple rappel par la haute autorité de la possibilité ouverte aux parties par l’article 13 de la loi du 30 décembre 2004 de demander aux juridictions civiles, pénales ou administratives, lorsqu’elles sont saisies de faits relatifs à des discriminations, de l’inviter à présenter des observations ne saurait être regardé comme présentant le caractère d’une décision faisant grief ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que ne sont pas recevables les conclusions de la Société « Éditions Tissot » tendant à l’annulation pour excès de pouvoir de la délibération n° 2006-56 du 3 avril 2006 par laquelle la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, d’une part, lui a recommandé la mise en place d’une formation des personnels d’encadrement et des ressources humaines sur le harcèlement moral et le droit du travail applicable et la création d’une procédure d’alerte favorisant l’expression de tous les salariés dans des conditions satisfaisantes et le règlement amiable des conflits et, d’autre part, a rappelé à la personne ayant introduit une réclamation à son encontre qu’elle pouvait, en application de l’article 13 de la loi du 30 décembre 2004, solliciter de la juridiction prud’homale qu’elle invite la haute autorité à présenter ses observations dans son dossier ; qu’en conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées…(Rejet de la requête.)